De Château Falkenstein et de ses carnets (1/2)
Château Falkenstein compte de nombreuses spécificités. Une des plus inhabituelles est sans doute de demander aux joueuses et aux joueurs d’abandonner la sacro-sainte feuille de personnage pour tenir une sorte de journal de bord ou de carnet intime de leurs alter ego. Dans nos souvenirs, de nombreux groupes historiques ont rapidement écarté cet aspect du jeu lors de sa sortie : sans doute était-ce trop contraire à leurs habitudes, aussi ont-ils préféré revenir à une fiche plus classique. Naturellement, vous pouvez faire comme vous le souhaitez et personne ne viendra vérifier comment vous jouez. Toutefois, si les avantages de la feuille de personnage sont évidents (moins de travail et informations plus facile à trouver), il nous a semblé intéressant de faire un billet sous forme de fausse FAQ pour répondre à quelques questions concernant ces fameux carnets, et pour montrer comment nous les avions utilisés dans nos campagnes. Naturellement, on va en profiter pour vous présenter quelques extraits.
Pour éviter que ce billet ne soit beaucoup trop long, nous allons le diviser en au moins deux parties, en abordant aujourd’hui les questions plus générales (sur l’aspect, le type de carnets, etc.), et on abordera plus précisément quelques techniques dans le prochain billet.
Avant de commencer, on en profite pour remercier nos joueuses et joueurs qui ont accepté que l’on vous montre leurs créations. D’ailleurs, si vous trouvez qu’il y a trop de texte dans ce billet (spoiler : c’est le cas !) et que vous voulez juste vous rincer l’oeil, vous pouvez faire défiler jusqu’aux miniatures, un peu plus bas. On vous demande juste de bien garder à l’esprit que les exemples montrés ici sont de vrais carnets de jeu et pas du matériel promotionnel à la base, même si on les utilise en partie comme tels aujourd’hui. Certains ont été rédigés pendant les séances, d’autres entre les séances à partir de notes prises en jeu. C’est donc normal qu’il y ait des fautes, des omissions, des ratures, que tout le monde n’ait pas compris un événement de la même façon, etc.
Et pour celles et ceux que ça peut intéresser, voici le lien vers la page de la précommande.
À quoi servent ces fameux carnets ?
L’utilisation peut varier selon les préférences des uns et des autres, mais on compte essentiellement cinq usages principaux :
1) noter la présentation ou l’historique du personnage ;
2) garder la trace de son niveau dans les différents Talents ;
3) prendre des notes sur ce qu’il se passe durant les séances ;
4) noter ce qu’il se passe entre les séances, notamment concernant d’éventuelles progressions du personnage ;
5) regrouper les différentes aides de jeu et autres accessoires fournis durant la partie.
Il n’existe pas de règle précise sur la façon dont doit être découpé un carnet, mais d’expérience, les deux premiers usages font l’objet d’une section clairement définie, et le reste est noté au fil de l’eau quand on en ressent le besoin, au fur et à mesure des évolutions de la campagne.
Concernant l’historique du personnage, Château Falkenstein propose une méthode assez efficace lorsque l’on souhaite commencer une campagne. Elle consiste à répondre à un questionnaire relativement fourni, puis à synthétiser le tout en quelques paragraphes selon un modèle précis. L’idée est d’obtenir l’équivalent d’une page A4, mais d’expérience, la plupart des joueuses et des joueurs se prennent au jeu et font bien plus, ce qui ne gâche que rarement la fluidité des présentations obtenues et vous permet d’obtenir de nombreux éléments à réutiliser plus tard.
Par exemple, voici celle d’un des personnages de notre table : Jeanne.
Concernant les Talents du personnage, ce qui est généralement fait est d’allouer une page ou deux du carnet, le plus souvent vers le début ou la fin de celui-ci, pour pouvoir noter les niveaux et les retrouver rapidement en cours de partie. Oui, cela revient peu ou prou à recréer une fiche. En fait, cela vous permet surtout d’avoir les avantages de deux approches : l’immédiateté d’une fiche, et la quantité d’informations et la personnalisation d’un carnet. Si vous jouez en ligne, vous pouvez également trouver de nombreuses autres solutions pour parfaire celle-ci.
Quelle forme prennent-ils dans l’univers du jeu ?
Ils représentent généralement les carnets de bord ou journaux intimes des personnages. Des alternatives sont possibles, comme en faire une sorte de correspondance que le personnage entretiendrait. Pour donner un exemple, pour P’tit Pierre, un vétéran de l’expédition au Mexique, cela prenait la forme de lettres qu’il écrivait à sa mère (cliquez ici pour un aperçu). Tant que cela vous inspire, autant ne pas vous priver.
Là encore, il est possible de créer un peu plus de jeu en fonction des règles que vous mettrez en place concernant les conséquences de la manipulation des carnets réels dans l’univers du jeu. Est-ce qu’un PNJ peut lire un carnet ou le trouver s’il fouille un personnage ? Est-ce que si une joueuse ou un joueur lit le carnet de quelqu’un d’autre, cela signifie que son personnage est au courant de ce qui s’y trouve ? Peut-on se voler les carnets ? Des réponses à ce type de questions vont naître des dynamiques très différentes. Dans certains cas, personne ne se déplacera sans son carnet, dans d’autres, le groupe aura probablement tendance à se les partager et à se les montrer. Les deux approches peuvent se justifier, selon le résultat que vous souhaitez obtenir. De notre côté, nous vous suggérons juste d’expliquer clairement qu’il n’est pas possible de subtiliser, cacher ou détériorer les carnets des autres (même pour en protéger les personnages).
Et dans « la vraie vie », cela ressemble à quoi ?
Au risque de ne surprendre personne, il s’agit généralement de carnets vendus dans le commerce, que l’on peut généralement retrouver à un prix abordable dans une papeterie, un supermarché ou sur Internet. Comme cette technique est surtout utilisée pour le jeu en campagne et que la mortalité n’est généralement guère élevée dans les parties de Château Falkenstein, il n’est pas rare que certaines joueuses ou joueurs investissent dans un carnet fantaisie afin de marquer le coup ou d’illustrer la personnalité de leur alter ego. Naturellement, cela n’a rien d’obligatoire, et n’importe quel support se tenant d’un seul bloc et aux pages suffisamment épaisses pour que l’on ne voit pas à travers fera l’affaire.
À noter qu’il est possible de commencer à créer du jeu dès le choix des carnets. Ainsi, avant le début d’une de nos campagnes précédentes, l’hôte avait acheté cinq carnets ornementés avec des styles assez différents, un pour chaque membre du groupe, et les avait mis dans un coffre en bois. La toute première chose à faire lors de la première séance avait été d’ouvrir le coffre et de choisir un carnet qui corresponde plus ou moins à ses envies de création, si possible en se les répartissant au sein du groupe.
Mais cette astuce ne fonctionne que pour des carnets physiques. Pour les personnes qui ne jurent que par le numérique, rien n’empêche de vous contenter de ce support. En fait, même si nous avons une préférence pour le papier, cette option n’est en rien un pis-aller. Le numérique vous privera peut-être d’une certaine forme d’immersion et de quelques opportunités de jeu spécifiques (glisser réellement un aide de jeu dans un carnet, par exemple), mais il vous en facilitera ou en offrira d’autres (altérations, copies, etc.).
Dans le cadre de la campagne dont on va surtout parler ici, seul un joueur utilisait un carnet purement numérique. Le reste de la table écrivait des notes sur un véritable carnet, et le prenait en photo pour le partager avec l’hôte.
Non, mais ça suffit le bla-bla. Vous avez des exemples à nous montrer ?
Ah. On se demandait quand on allait se le demander (vu que l’on fait les questions et les réponses). Plus sérieusement, on vous a mis ci-dessous quatre exemples. Il s’agit de quatre carnets faits par des joueuses ayant joué le même scénario – le premier de la campagne en question, et que l’on continue encore aujourd’hui. Comme vous le verrez, ils ont des aspects très différents. Certains comportent des schémas, d’autres des aquarelles, d’autres encore des (faux) poils volés à un félin faërique, et le quatrième est plutôt spécialisé dans la note au kilomètre. Tous sont viables et ont des qualités et des défauts différents.
Mais si nous les présentons ainsi, c’est aussi et surtout pour vous montrer que la beauté de votre écriture ou votre capacité à dessiner ne sont finalement pas si importantes. Elles pourront jouer sur le type de carnet que vous proposerez, mais elles ne vous empêcheront pas de profiter de l’utilisation de carnets en jeu. Car pour pouvoir tirer le meilleur parti de cette approche, il n’est pas nécessaire que vos créations soient particulièrement belles, bien écrites ou parfaites (ce qui est le meilleur moyen de n’arriver à rien de concret). Il faut juste qu’elles existent.
Voici donc quelques exemples. Cliquez sur les images pour télécharger les carnets et vous faire une idée :
Alors, ce sont les autres qui font tout le boulot ?
En grande partie, oui. Il existe de nombreuses méthodes de prises de notes, voire d’outils en ligne, pour éviter d’y passer du temps. Certaines joueuses de notre table arrivaient à le faire uniquement au cours des séances, mais cela demande sans doute un peu d’entraînement.
Néanmoins, cela n’a rien d’obligatoire, et si on se fie à notre expérience, il est très courant que l’hôte crée un peu plus tard des aides de jeu ou fournisse des illustrations, et que ses camarades les intègrent dans leurs carnets. Bon, le nôtre est particulièrement friand de ce genre de choses, mais, il faut bien reconnaître que trouver des illustrations pour les PNJ est souvent un gain de temps et de cohérence pour tout le monde. Et c’est sans doute encore plus vrai avec le numérique.
À ce titre, une bonne pratique est d’apprendre à laisser de la place dans la prise de notes durant la séance, afin de pouvoir glisser dans les carnets des portraits de PNJ ou des aides de jeu un peu plus tard, et de les intégrer de façon plus harmonieuse. Même imprimée et collée, une photo d’époque (vraie ou générée avec un bon filtre) s’intègre généralement sans grande difficulté ni faire artificielle. L’hôte, de son côté, peut soit préparer les visuels à l’avance (dans ce cas, on lui conseille d’avoir un « stock »de personnages divers pour éviter qu’il soit trop facile de distinguer ce qui est prévu de ce qui est improvisé), soit, plus simplement, les fournir entre les séances.
Concernant les aides de jeu fournies pour être intégrées dans les carnets (pas simplement les illustrations, donc), elles ne changent guère de celles que vous avez sans doute déjà l’habitude de faire ou de distribuer à vos tables. Toutefois, le fait de les ranger et de fouiller dans son carnet permet notamment de jouer sur la durée entre le moment où un indice est donné et celui où il prend véritablement sens. Par exemple, un personnage va remarquer que dans le rapport de police concernant l’arrestation de son frère, tous ses complices ont été exécutés, sauf un seul, dont le nom ressemble à celui d’un PNJ croisé très régulièrement dans la campagne. Bref, il n’y a plus forcément urgence à se creuser la tête jusqu’à trouver la réponse, et on peut prendre le temps d’y arriver à son rythme, mais aussi accepter de ne pas voir certains éléments pour ne les découvrir que plus tard. L’impact de la révélation n’en est que plus grand. Bien sûr, l’utilisation d’un carnet n’est pas obligatoire pour obtenir cet effet, mais il semble arriver bien plus facilement et plus couramment lorsque l’on se sert de ce type d’accessoire.
De façon similaire, vous pouvez cacher des accessoires dans le carnet d’une joueuse ou d’un joueur à son insu : petits papiers, lettres, etc. Cela va créer une surprise, puis amènera à la fois des interrogations sur le contenu de l’aide de jeu et sur la façon dont, dans l’univers du jeu, elle a été remise au personnage sans qu’il s’en aperçoive.
Bon, tout cela donne un premier aperçu de l’utilisation des carnets, et vous permet de voir quelques exemples, mais nous allons aller plus dans le détail de quelques techniques dans le prochain billet.
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