Structures, développements et appropriations des univers de jeux de rôle : de l’intégration à l’intercréativité

On l’avait évoqué lors de nos deux derniers billets, mais il y a un peu plus de trois ans sortait le livre Le Jeu de rôle sur table, un laboratoire de l’imaginaire, qui rassemblait notamment les actes des journées d’études « Les 40 ans du JdR » qui se sont tenues en mai 2015 et ont été organisées conjointement par les universités Paris III et Paris XIII.

Ayant désormais la possibilité de les partager sur ce site, nous mettons à disposition les articles que nous avons publiés dans le cadre de ce recueil.

Celui de cette semaine, Structures, développements et appropriations des univers de jeux de rôle, détermine trois façons d’organiser l’univers d’un jeu de rôle en fonction des rapports intercréatifs que l’on souhaite que les joueurs et les joueuses entretiennent avec la fiction, et, plus globalement, dont on souhaite solliciter et cadrer leur créativité.

Quelques remarques pour éviter que vous soyez surpris :
+ il date de 2016, et ne prend en compte que trois manières de définir ce rapport aux cadres de jeu, sans prétendre à l’exhaustivité. Il en existait déjà d’autres à l’époque, et il en existe sans doute encore de nouvelles aujourd’hui ;
+ pour avoir accès à certaines sources citées, il sera parfois nécessaire d’avoir les jeux dont il est question, à savoir les deux premières éditions de RuneQuest, de la première édition en VO de Vampire la Mascarade, et d’Oltrée ! ;
+ comme l’article est long, le voici au format PDF si vous préférez.

Bonne lecture !


Introduction

Cet article a pour objectif de déterminer trois typologies d’univers de jeux de rôle (JdR), selon la manière dont ils prévoient l’influence des joueurs. Il propose de mener une réflexion sur les rapports que les JdR permettent d’entretenir avec la fiction. Lors de notre thèse[1]Coralie David, Jeux de rôle sur table : l’intercréativité de la fiction littéraire, thèse de doctorat en Littérature générale et comparée, Paris, Université de Paris XIII, avril 2015., nous avons défini le concept d’intercréativité qui, selon nous, constitue l’essence du JdR. Celle-ci est rendue possible au terme de trois étapes, qui commencent dès la création d’un JdR jusqu’aux parties qu’il permet de jouer.

La première est la disruption du bloc fictionnel. Par bloc fictionnel, nous entendons une œuvre de fiction en tant qu’unité contenant en un seul ensemble un univers, des personnages et un récit (roman, film, etc.), ou un genre défini par une esthétique particulière (fantasy, science-fiction, horreur), ou une typologie de scène archétypale (les premiers rendez-vous amoureux dans le JdR Breaking the Ice[2]Emily Care Boss, Breaking the Ice, Plainfield, Black and Green Games, 2005.). La disruption consiste à identifier et à désolidariser les éléments qui composent les mécanismes et les codes d’un bloc fictionnel. Par exemple, la première édition de Dungeons & Dragons[3]Ernest Gary Gygax, Dave Arneson, Dungeons & Dragons, Lake Geneva (WI), Tactical Studies Rules (TSR), 1974. (D&D) revendique comme source la littérature fantasy. Les auteurs identifient les éléments qui font l’essence du genre et les décomposent pour en faire des mécanismes ludiques : chaque personnage de la Terre du Milieu de J. R. R. Tolkien[4]John Ronald Reuel Tolkien, The Lord of the Rings, London, George Allen and Unwin, 1954-1955. est une unité formée de caractéristiques. Une fois désolidarisées de cet ensemble, elles deviennent les classes et les races indispensables pour créer un personnage-joueur (PJ) dans le jeu : les hobbits Pippin et Merry sont les stéréotypes des roublards, Gimli, le nain bourru des montagnes qui se bat à la hache est un guerrier, Legolas est le bel elfe archer. La mémorisation des sorts est empruntée à Jack Vance et a son cycle The Dying Earth[5]Jack Vance, The Dying Earth, New York, Hillman Periodicals, 1950..

Cela nous amène à la deuxième étape, la systémation, c’est-à-dire le fait de mettre ces mécanismes à disposition des joueurs, de les rendre utilisables pour qu’ils puissent les manier comme des outils de création de leurs propres éléments fictionnels. Pour reprendre notre exemple, les classes et les races permettent de créer un personnage. Cette mise en système des composants de la fiction comme mécanismes ludiques les transforme en outils de création qui permettent de rester dans un cadre défini, ici la fantasy classique.

La troisième étape est la réorganisation narrative de ce matériau fictionnel que les joueurs créent ensemble. Il est d’une part fourni par le jeu, et d’autre part créé par les joueurs. C’est la raison pour laquelle nous parlons d’un media intercréatif. Cette intercréativité est démiurgique et narrative : les joueurs intègrent certains éléments déjà connus et en créent de nouveaux, qu’ils réagencent pour générer une nouvelle unité, un nouveau bloc fictionnel qui est leur création. Pour la définir, l’intercréativité permet de co-créer une fiction au lieu de limiter les choix des récepteurs au simple fait de réagir à un contenu qui leur est proposé. En cela, elle représente un prolongement de l’interactivité. La réception devient dès lors une étape du processus créatif. S’il existe d’autres media interactifs comme le jeu vidéo, la spécificité du JdR est de permettre un rapport intercréatif à la fiction.

Dans le cadre de cet article, nous allons nous attacher à répondre aux questions suivantes : Comment les univers de JdR sont-ils mis à la disposition des joueurs ? Comment le système de jeu, que nous définissons comme l’ensemble des dispositifs qui permettent de rendre la fiction interactive et intercréative, prévoit-il l’apport créatif des joueurs lors des parties, qui fait la spécificité du media rolistique ? Comment est-ce que les éléments diégétiques deviennent des forces oppositionnelles ou adjuvantes, et au-delà, un « réservoir » de potentialités narratives ? Comment s’articule la relation entre les éléments diégétiques directement issus du jeu, et ceux qui relèvent des apports créatifs des joueurs ? Comment le JdR organise-il un rapport intercréatif à la fiction ?

Pour y répondre, nous allons étudier trois univers de JdR, afin d’analyser la manière dont ils rendent le matériau fictionnel inerte interactif et intercréatif pour les joueurs. Il s’agit d’identifier le processus par lequel ils répartissent l’apport créatif des joueurs, en attribuant différemment ce que nous appelons l’autorité générative (qui érige les éléments diégétiques composant l’univers) et résolutive (qui préside à la prise des décisions durant la partie selon le principe de Lumpley : « le système est le moyen par lequel chaque groupe de joueurs arrive à un accord sur le contenu de l’espace imaginaire commun[6]Le principe de Lumpley a été formulé par Vincent Baker et Emily Care Boss, deux auteurs de JdR. Cité par Joseph Young, « Théorie 101 – 1re partie : le système et … Continue reading ». Nous avons choisi trois œuvres emblématiques d’époques différentes : deux jeux américains et un français. Deux appartiennent au genre de la fantasy et un au fantastique. Le premier est RuneQuest[7]Steve Perrin, Greg Stafford, RuneQuest, Oakland, Chaosium, 1978. Nous citerons la seconde édition du jeu de 1980, qui ne présente pas de différences majeures avec la première de 1978. (dont nous prendrons pour référence la seconde édition de 1980), et l’univers de Stafford qui lui a été lié, Glorantha. Le deuxième est Vampire: the Masquerade[8]Graeme Davis, Tom Dowd, Andrew Greenberg, Mark Rein. Hagen, Lisa Stevens, Stephan Wieck, Stewart Wieck, Vampire: the Masquerade, Stone Mountain, White Wolf, 1991., qui a marqué les années 1990 (nous considérons ici la première édition de 1991). Le dernier est le récent Oltrée ![9]Le Grümph, Oltrée !, Jouy-le-Moutier, John Doe, 2013. Ce choix résulte de la prise en considération de deux critères essentiels : leur large diffusion auprès des joueurs et une certaine postérité, d’une part, et leurs caractéristiques qualitatives ou innovantes, d’autre part.

Glorantha, un réseau à intégrer

Glorantha, monde de fantasy à l’esthétique plus antique que médiévale, n’est pas spécifiquement créé pour le JdR. C’est celui qu’a imaginé Greg Stafford dès les années 1960 à partir de ses lectures mythologiques et de sa propre expérience. Sa première caractéristique est d’être un univers très défini fondé sur la cohérence. Il est dès le départ identifié par ses limites spatiales et son inscription dans un large contexte cosmologique : ce n’est pas une planète, mais un losange. Ce monde plat flotte sur la rivière Sramak, l’océan primordial, et il est surmonté d’un dôme céleste. Entre le ciel et la terre se trouve le royaume de l’Air, et sous la terre et l’océan le sombre et silencieux Underworld. Les premières pages sont marquantes pour leur discours didactique en focalisation zéro et omnisciente, concentré sur le passé de l’univers : « Au début, il n’y avait pas d’histoire, la création initiale s’est formée dans une période magique, de simultanéité sans temps appelée Temps des Dieux[10]RuneQuest, op. cit., p. 4.. » Les informations sont transmises avec exactitude, selon une tonalité qui oscille entre le texte encyclopédique et la genèse mythique. L’espace est toujours lié à l’histoire lorsqu’il s’agit de le définir : l’objectif est de permettre aux joueurs de créer leur personnage à l’intérieur de ce cadre cohérent, et de faire en sorte que cette logique transparaisse dans la construction des PJ.

Le développement diégétique implicite est le second aspect caractéristique de Glorantha. Il fait partie de ces mondes qui vont s’enrichir par un effet de grossissement de certains points précis, qu’auteurs ou joueurs vont développer. Chaque supplément mettra en lumière un pan spécifique de l’univers, les autres demeurant dans l’ombre : ils pourront être approfondis lors de futurs suppléments ou laissés à la libre interprétation et créativité du meneur de jeu (MJ), ce qui est assez prégnant à la lecture des commentaires qui suivent la carte de Glorantha :

Les régions grisées sont des régions inconnues des races mortelles. Il existe de terres où vivent des races surnaturelles immensément puissantes. […] Seuls des Héros peuvent se rendre dans ce genre de royaumes et survivre, et à partir de là trouver le chemin vers le monde des dieux. […] De prochains ouvrages édités par Chaosium exploreront et détailleront ces régions[11]Perrin, Stafford, RuneQuest, op. cit., p. 7..

Les espaces mystérieux constituent un appel à l’aventure et une « réserve » de suppléments potentiels à éditer. Les lieux mentionnés sur la carte dont les noms propres ne sont pas évoqués dans les textes du livre de base ont recours à un champ lexical évocateur : Kahar’s Sea of Fog, Burning Wastes, etc. Le but est de susciter des promenades inférentielles chez les joueurs, d’inspirer leur imagination et de donner une base de description au MJ : le nom « Burning Wastes » implique peut-être un désert brulant, mais tout est à définir par la créativité des joueurs si jamais les PJ décident de s’y rendre. L’objectif est donc double : prévoir un développement de la gamme avec des suppléments, et laisser des zones d’ombre où la créativité des joueurs pourra s’exprimer.

La troisième caractéristique de RuneQuest est que l’intégration des PJ à l’univers de Glorantha constitue un des buts du jeu. En proposant deux types de campagnes, les auteurs tentent d’inscrire l’exploration au programme, au-delà des missions qui résument l’espace au donjon : les campagnes épisodiques ne comprennent que les phases de mission, là où les campagnes complètes sortent les PJ des affrontements pour les intégrer à un monde à part entière. Elles les investissent par là d’une dimension fictionnelle plus substantielle, qui contient en germe de nouvelles potentialités narratives :

Cela demande davantage d’engagement aux personnages et envers le monde dans lequel ils vivent. Ils doivent prendre soin de la cité dans laquelle ils dorment, des cultes avec lesquels ils ont de bonnes relations, ou des familles auxquelles ils accordent leur confiance. Les personnages […] pourraient être entraînés dans la querelle d’un cousin, ou être obligés de se cacher pendant des mois sans jouer parce que les autorités les cherchent. Il peut arriver que les joueurs se retrouvent à vivre de longues « aventures parlées », sans qu’un sort soit jeté ou qu’une arme soit tirée[12]Ibid., p. 102..

L’univers de jeu passe du statut de ressource oppositionnelle (la plupart des créatures présentées dans D&D[13]Gygax, Arneson, Dungeons & Dragons, op. cit. sont des adversaires potentiels des PJ) à celui de réseau dense et complexe, qui n’existe plus en tant que seule force oppositionnelle mais en tant qu’univers dans lequel les personnages sont incorporés. La manière dont les joueurs vont choisir d’intégrer leur PJ au monde leur sera propre, par le choix des cultes et des guildes qu’ils rejoindront, et générera des intrigues qui seront uniques : cela implique de personnaliser le monde en y injectant la créativité des joueurs, en s’appropriant une partie de l’autorité générative et résolutive. Un des exemples les plus emblématiques de ce système de jeu qui a pour but d’intégrer les PJ à l’univers concerne leur évolution. Il met en place un moyen intradiégétique pour obtenir des augmentations, les guildes. Le processus est détaillé pour chaque organisation : les joueurs sont libres, selon leurs ambitions et les spécialités qu’ils veulent développer, de choisir : les Sages libres (p. 47) pourront les aider à parfaire les compétences « scolaires » (langues étrangères, lecture et écriture, cartographie, etc.) de leurs personnages, les Associations de voleurs pourront leur enseigner l’escalade, le crochetage, etc. Le système est pensé pour que chaque acte des PJ hors des « missions » elles-mêmes soit signifiant intradiégétiquement, les implique dans l’univers et soit générateur d’intrigues qui leur seront propres et singulariseront leur personnage : « Les cultes magiques, les groupes guerriers et les autres guildes sont tous liés, d’une manière ou d’une autre, à la politique d’une région[14]Perrin, Stafford, RuneQuest, op. cit., p. 22.. » Le simple fait de vouloir augmenter sa puissance n’est pas seulement un processus mécanique mais aussi un moyen de provoquer la créativité des joueurs : que va demander la guilde des Sages libres pour son aide ? Le personnage est donc une base qui contient dès sa création de nombreuses potentialités narratives et diégétiques. Il est amené à se développer et à être enrichi alors même qu’il enrichit le monde.

Cet équilibre entre ultra-cohérence et potentialités implicites fait de Glorantha un réseau. Lorsque de nouveaux éléments sont proposés par les joueurs, le jeu donne un cadre qui permet de les intégrer en tant qu’engrenages de ce réseau. Glorantha est un univers pléthorique : il procède par développement de points précis, imbriqués comme les pièces d’un système, à partir d’une base définie dès ses prémices et fortement liée à sa spatialisation. Les joueurs sont invités à découvrir sa richesse, et à développer leur personnage en le nourrissant de cette richesse. Ce genre de mondes rolistiques propose davantage d’intégrer un cadre défini et d’évoluer à l’intérieur. Les joueurs y incorporent leur personnage, et créeront des fragments de monde qui lui seront liés dans les zones laissées dans l’ombre par les auteurs du jeu. Chaque fois qu’un joueur ajoute une « brique » au monde, celle-ci doit immédiatement fonctionner en réseau avec les autres.

Vampire: the Masquerade[15]Nous nous référerons à la première édition de 1991 (Graeme Davis, Tom Dowd, Andrew Greenberg, Mark Rein. Hagen, Lisa Stevens, Stephan Wieck, Stewart Wieck, Vampire: the Masquerade, op. cit.). : un schéma relationnel à appliquer

Vampire fait partie de ces JdR qui détachent le scénario rolistique du concept de mission : il fonde son horizon ludique sur la notion de personnage, et a pour thèmes principaux la lutte intérieure entre la bête et l’humain, ainsi que les intrigues politiques dans la société vampirique. Vampire est avant tout un univers social : le livre de base décrit essentiellement le Monde des ténèbres par l’inscription des PJ dans celui-ci.

Ils se définissent par l’appartenance à un clan qui, pour emprunter un raccourci, recoupe le concept de classe de personnage : les hideux Nosferatu, les Tremere sorciers, les Ventrue conservateurs, les bestiaux Gangrel, etc. La description des clans comprend des paramètres mécaniques (les Disciplines, ou super pouvoirs) et diégétiques (apparence, relations avec les autres clans), qui définissent le personnage en l’intégrant à la société vampirique. Celle-ci s’organise selon un schéma spécifique : chaque ville est dirigée par un prince assisté par un conseil d’anciens appelé le Primogène, dont les membres appartiennent aux divers clans. Les plus anciens vampires sont engagés dans ce que l’on appelle le Jyhad, une guerre politique pour laquelle ils utilisent les plus jeunes. Les PJ sont déterminés par leur appartenance à différentes sphères sociales : les clans cités appartiennent à la Camarilla, une secte dont le but est de maintenir la Mascarade, c’est-à-dire de dissimuler l’existence des vampires aux humains. Ils s’opposent aux clans du Sabbat, d’autres vampires. Les membres d’un troisième groupe, l’Inconnu, restent à l’écart. Le groupe de PJ est une Coterie. Autre paramètre définitoire crucial, la génération : elle indique à quel point le sang du vampire est proche de celui du vampire originel, Caïn. Elle indique la puissance globale du personnage, mais également sa place dans la hiérarchie sociale, puisque le Primogène est la plupart du temps composé des vampires de la plus ancienne génération. Le Concept (p. 43) représente la façon dont se définissait le personnage dans la société humaine avant de devenir un vampire : criminel, ouvrier, etc.

Il doit ensuite choisir sa Nature, qui correspond à son identité profonde (conformiste, fanatique, etc.) et son Demeanor, à savoir la personnalité qu’il montre au reste du monde (martyr, survivant, etc.).

Alors que le joueur crée son PJ, comme dans n’importe quel autre JdR, il crée un fragment d’univers. Mais Vampire le pousse à créer un microcosme social autour de son personnage : « Posez-vous ces questions à propos de vos servants : comment vous assurez-vous leur loyauté ? […] Est-ce que votre présence les subjugue ? Êtes-vous amis ? […] Quelles sont leurs capacités spéciales[16]Vampire: the Masquerade, op. cit., p. 51. ? » Ces personnages non joueurs (PNJ) ne sont pas de simples ressources, le joueur doit là encore créer un personnage. L’univers de Vampire est avant tout une multiplicité de sphères sociales dont l’imbrication définit le PJ. La créativité des joueurs s’exprime dans la manière dont ils vont articuler ces relations sociales. Ensuite, Vampire est un univers qui peut être décrit comme un schéma déclinable et adaptable. Une de ses grandes innovations est d’avoir conçu un monde qui fonctionne comme un schéma générique, une mise en tension déclinable à toutes les villes occidentales qu’il suffit d’appliquer : « il serait stupide de lister et de décrire chaque clan, prince et fief du monde. Il suffit de dire que chaque ville mortelle comprend une population vampirique, qui est organisée de diverses manières[17]Ibid., p. 13-14.. »

Si par la suite la gamme sera renommée pour ses suppléments By Night qui se concentrent sur une ville particulière, cette espèce de « macro schéma actantiel » contient en germe les oppositions fertiles qui seront le moteur du jeu : il met en place des clans (qui ont la fonction de partis politiques), d’opposants surnaturels (loups-garous et mages), humains (chasseurs de vampires, agences gouvernementales), vampires (Sabbat) et d’adjuvants (goules). Cet univers se définit davantage par une organisation sociale particulière que par un espace spécifique, contrairement à Glorantha. Le Monde des ténèbres se voit autant enrichi par un contenu que par l’éclatement des focales à travers lesquelles il est saisi. La créativité des joueurs va pouvoir se déployer dans la manière dont ils vont adapter ce schéma aux villes de leur choix.

La troisième caractéristique de Vampire est la subjectivisation des informations, dont les marques émaillent le texte : « Personne ne sait ce qui s’est vraiment passé pendant ce rituel[18]Ibid., p. 132.. », « Une légende populaire parmi les Damnés dit que le fondateur des Malkaviens a été maudit par Cain[19]Ibid., p. 179.. » Par ce moyen, les auteurs laissent aux joueurs le choix d’imaginer les causes et les conséquences de l’existence de ces éléments, au moins jusqu’à la parution de suppléments, et leur confèrent ainsi une part de l’autorité générative. Ces faits n’étant pas révélés comme avérés, les auteurs ouvrent l’éventail des possibilités pour que les joueurs aient plus de liberté. Le but est de susciter la curiosité du MJ, de lui donner envie d’investir ces zones d’ombre : pour reprendre un des passages que nous venons de citer, cette incertitude pourrait inspirer une campagne où des PJ appartenant au clan des Malkaviens découvrent que leur ancêtre a effectivement été maudit par Caïn. Cela pourrait toutefois poser problème si, par la suite, la parution d’un supplément proposait une version « officielle » qui aurait une répercussion sur d’autres éléments de l’univers, qu’il serait dès lors impossible pour cette table d’intégrer. Il s’agit de jouer entre objectivisation, pour donner la sensation d’être face à un monde cohérent et riche, et subjectivisation, afin de susciter la curiosité et de laisser des zones d’appropriation pour la créativité des joueurs.

Enfin, Vampire a pour caractéristique de proposer un univers en tension narrative. Sa spécificité majeure tient dans cette progression que l’on appelle metaplot, méta-intrigue. Dès ses prémices, Vampire annonce une échéance cosmologique, la Géhenne, où les anciens vampires reviendront pour dévorer leurs descendants. Ce fil narratif s’étend sur l’ensemble de la gamme, les prophéties la concernant sont distillées dans divers suppléments. Cette méta-intrigue comme structure démiurgique transversale qui sous-tend l’identité d’un univers nous semble emblématique des JdR des années 1990. Les mondes ne sont plus seulement pensés comme des espaces luxuriants en termes de contenu, figés dans un instant T où les PJ les intègrent, mais comme des univers en évolution, tendus par une ligne narrative qui les inscrit dans une dimension temporelle. Il s’agit d’incorporer les PJ dans cette évolution globale et de déterminer leur influence sur celle-ci.

En conclusion, l’univers de Vampire, contrairement aux mondes pléthoriques comme Glorantha, est un univers schématique : défini par les relations sociales plus que par l’espace, il est structuré par un macro schéma actantiel qui porte en germe le réseau de relations qui unit les différents protagonistes, et par une méta-intrigue qui implique les PJ dans une progression globale. Cela lui confère une dynamique qui n’est pas figée mais évolutive. Plutôt que de proposer aux joueurs d’intégrer un monde subcréé déjà très défini, Vampire leur transmet un schéma, auquel les suppléments ajouteront de nouvelles strates, qu’ils vont pouvoir adapter dans la ville de leur choix. Il ne s’agit plus tant d’intégrer un monde que de proposer une structure générique qui pourra être personnalisée par les joueurs, à qui on laisse une part d’autorité générative plus importante que sur Glorantha en ce qui concerne les lieux eux-mêmes. Nous allons voir maintenant la façon dont Oltrée ! leur accorde une part d’autorité générative encore plus importante.

Oltrée ! Une base diégétique à développer

Oltrée ! est un JdR de fantasy où les PJ explorent des terres qui furent autrefois celles d’un empire dont il ne reste que des ruines. Ils doivent également protéger les plus vulnérables et remettre en état des zones abandonnées. Ce jeu s’inspire des premiers JdR, dont il revisite les codes avec les apports contemporains qui visent à partager l’autorité. Cela confère à son univers trois spécificités majeures.

Tout d’abord, Oltrée ! propose un univers ouvert, que l’on appelle également un « bac a sable[20]« Bac à sable (VO. Sandbox) – un style de jeu ou les joueurs vagabondent dans le paysage, sans que le meneur de jeu ne leur indique la direction. Rob Conley, Bat in the Attic (about … Continue reading ». Il revient aux sources du JdR, mais en fournissant des cartes à l’échelle d’une région, il ouvre considérablement l’espace et par conséquent la liberté de mouvement des PJ. Les éléments du monde (peuples, types de communautés, etc.) ne sont que des composants peu définis que le MJ va pouvoir agencer selon sa volonté. Voici un exemple expliquant les différentes étapes d’une création de région que le MJ fait avant la partie. La première consiste à préparer les contours de la carte et y placer les reliefs, les types de paysage et les cours d’eau. Ensuite, le MJ crée et positionne les communautés (cités, domaines agricoles, etc.). Pour chaque communauté, le jeu fournit une table aléatoire, un outil pour définir ses spécificités. Nous choisissions de mettre une cité naine, une des communautés proposées p. 43. Deux tables aléatoires permettent de la définir. La première, selon sa situation, en jetant un dé à huit faces : si nous faisons 1, ce sera une ancienne forteresse, si nous faisons 2, une cité souterraine, etc. Imaginons que nous fassions 3, notre cité naine est donc nomade. La seconde table nous propose de déterminer l’occupation principale de ses habitants. Nous relançons un dé et obtenons un 5, qui correspond à la ligne « forgerons ». Deux autres tables nous enjoignent à définir des thèmes qui singularisent la communauté, et le type d’intrigues qui lui sont liées, ainsi qu’une faction associée. Nous retirons les dés et obtenons 24, ce qui correspond à l’entrée « secret ancien enfoui ». Nous faisons un jet pour déterminer une intrigue liée, et tombons sur l’entrée « folie ». Une dernière table aléatoire permet de choisir une faction à rattacher à cette intrigue. Après avoir lancé les dés, nous obtenons « un voleur de grand chemin ». Enfin, il nous faut déterminer les motivations de ce voleur : nous jetons les dés et obtenons « Alliance : la faction veut créer les conditions idéales pour une alliance à long terme avec une autre faction ou une communauté. »

Voici les graines qui vont nous permettre de « fertiliser » cette cité naine en termes d’intrigues, selon la manière dont nous allons agencer ces composants : imaginons que le « voleur de grand chemin » a été envoyé par la guilde des forgerons d’une autre cité pour dérober le « secret ancien enfoui » qui permet aux « forgerons » de la cité naine de créer des armes de qualité supérieure, à savoir une dague magique. Il a accepté cette mission car la guilde de voleurs dont il fait partie veut faire une « alliance » avec ce commanditaire. Ce qu’il ignore, c’est que sans les enchantements du mage de la cité naine, la dague rend son possesseur « fou ». Lorsque les PJ arrivent dans la cité, une série de meurtres inexpliqués a eu lieu (qui sont en réalité commandités par le voleur devenu fou).

Oltrée ! fournit des outils pour créer un univers en proposant des composants et des formules pour les lier. En sus de cette première création par le MJ, ce sont les joueurs qui, selon le parcours de leurs personnages et les éléments qu’ils ajouteront, en feront l’ensemble qui deviendra l’univers à part entière : « dans un bac à sable, les joueurs explorent et s’impliquent dans l’univers en étant aux origines des histoires[21]Ibid.. » Le MJ doit éviter de prévoir leur future utilisation. Car ils seront joués, ignorés, remplacés, modifiés par les joueurs. Oltrée ! met en place un équilibre pour répartir l’autorité générative démiurgique : en l’absence d’un scénario défini à l’avance qui donne une bonne raison dramatique aux PJ d’agir, il faut préparer des alternatives. Les joueurs déterminent leur objectif en début de partie, pour lequel ils ont une absolue liberté (pacifier les relations entre deux communautés ou enquêter sur un dragon), et choisissent leur motivation lors de la création de personnage (chasseur de trésors, conquérant, etc.). Ajoutons la raison d’être des patrouilleurs (explorer), et le fait que, pour chaque hexagone, les joueurs doivent déterminer le mode de déplacement de leurs personnages et leur but : sécurisation, chasse, etc., ces différents niveaux d’objectifs permettent de maintenir une cohérence générale en laissant un maximum de liberté créative aux joueurs.

La seconde spécificité du monde d’Oltrée ! est qu’il est intercréé par les joueurs. Participatif selon l’auteur, il partage l’autorité générative et résolutive. Pour ce faire, le système de jeu met en place plusieurs procédés comme, entre autres, les rumeurs ou les cartes.

En début de séance ou chaque fois que les PJ arrivent dans une communauté, ils sont invités à imaginer des rumeurs. Le MJ déterminera, aléatoirement ou pas, celles qui sont fondées, erronées ou fausses. Celles qui seront considérées comme véridiques feront partie intégrante de l’univers. Les cartes « exaltation » et les cartes « persécution » sont un outil qui octroie une plus grande part d’autorité résolutive. Les premières permettent d’obtenir un bonus, qui peut être d’ordre mécanique (relancer un jet raté). Les cartes « persécution » sont des événements néfastes pour les personnages que chaque joueur choisit de jouer, notamment pour gagner des cartes « exaltation ». Le MJ doit improviser à partir de ce contenu, mais la résolution de la situation est amenée par le joueur qui joue la carte, par exemple : « Jouez cette carte [persécution] quand vous faites face à des représentants de l’autorité locale. Vous finissez au trou avec quelques charges stupides qu’il faudra régler devant un juge quelconque. » Les joueurs peuvent décider pourquoi, quand et comment échouent leurs personnages, afin que cet échec représente un enrichissement démiurgique et dramatique.

Enfin, Oltrée ! permet aux joueurs de générer l’univers pendant les parties : c’est la sa troisième spécificité, d’être un monde émergent qui, contrairement à Glorantha, est en grande partie construit au présent, impulsé par les joueurs selon leurs idées. Dans le livre (p. 68), il est recommandé de tenir un journal de bord, où le MJ notera tous les pans d’univers au fur et à mesure qu’ils seront générés. Cette collectivisation indissociable de cette mise au présent de la démiurgie est posée comme le programme du jeu :

Le MJ prépare un terrain de jeu, des histoires, des accroches et des intrigues, mais sans jamais pouvoir préjuger de ce que les joueurs en feront. Pour lui le plaisir ne vient plus de l’habilité avec laquelle il va écrire ou dérouler son scénario, mais de la dynamique grisante qui le pousse à toujours s’adapter à ce que proposent les joueurs[22]Le Grümph, Oltrée !, op. cit., p. 4..

Si les univers de JdR, puisqu’ils font l’objet d’une réception intercréative, vont être tous plus ou moins singularisés lors de l’acte de réception, celui d’Oltrée !, car il laisse à la créativité des joueurs une plus grande marge de manœuvre, sera très différent d’un groupe à l’autre. En répartissant l’autorité générative, ce jeu organise l’intercréation de l’univers par les joueurs : contrairement à Glorantha qui nous permet d’intégrer un univers déjà défini ou Vampire qui nous le livre sous une forme schématique tendue par une méta-intrigue, il donne aux joueurs des composants fictionnels et des outils pour les manier, grâce auxquels ils vont construire leur propre monde. On ne crée donc plus de la fiction selon une logique d’unité figée livrée au récepteur en un tout, comme un roman, mais selon une logique de langage : on rend disponible des composants, des paradigmes (le lexique) utilisables par une syntaxe (le système de jeu) pour impulser l’intercréativité.

En conclusion, Oltrée ! constitue un troisième type d’univers, les mondes participatifs, dont la création collective est un enjeu en lui-même, rendue possible par cette mise au présent du processus démiurgique. Il se construit lors d’une progression ciblée (les participants décident de certaines informations lorsqu’ils en ont besoin) par les micro-créations successives des joueurs pendant la partie, encadrées et prévues par le système de jeu qui leur donne davantage d’autorité générative que dans un JdR plus classique.

Conclusion

L’univers rolistique est une mise en réseau. Nous avons dit que le JdR accomplissait une disruption du matériau fictionnel pour le mettre à disposition des joueurs. Nous avons identifié trois manières de rendre intercréatifs les univers : par intégration (le système permet d’investir un cadre déjà très défini), par schématisation (le système fournit aux joueurs une structure mise en tension qu’ils peuvent appliquer) et par co-génération (le système donne aux joueurs des outils pour créer et façonner un univers qui leur sera propre). Les univers de JdR sont construits comme des systèmes, comme l’était la Terre du Milieu. Comprendre la logique d’un système, c’est être capable de l’utiliser, d’où l’importance accordée à un fonctionnement cohérent. La crédibilité nécessaire à l’immersion ne relève pas tant de la distance plus ou moins importante avec le monde réel que de la vraisemblance interne du monde, mesurée à l’aune de ses propres codes. La cohérence est l’identité du monde fictionnel, et fait œuvre en elle-même, par les paradigmes mis en place par le jeu, dont les combinaisons constituent une infinité de narrations potentielles. Un univers rolistique est autant défini par son fond, par ses composants, que par la façon dont ils sont mis en réseau les uns avec les autres :

Ce ne sont ni la longueur ni le nombre des versions qui créent le sentiment de fréquenter un monde fictionnel, mais la densité des recoupements. Les procédés balzaciens de densification sont devenus des clés de construction artistique, industrielle et commerciale des mondes fictionnels[23]Olivier Caïra, Définir la fiction, du roman au jeu d’échecs, Paris, Éditions EHESS, « En temps et en lieux », 2011, p. 98..

La qualité de ces mondes fictionnels se mesurerait à l’aune de leur densité et des possibilités permises par leur systémation, et la cohérence des interactions produites par leur structure en réseau. Ces trois typologies sont parfois poreuses et tous les JdR sont intercréatifs à divers degrés : rien n’empêche des joueurs de Glorantha d’imaginer le contenu des zones qui ne sont pas détaillées dans le jeu. Mais les systèmes de jeu modalisent le niveau d’intercréativité. « Les mondes imaginaires sont inévitablement incomplets[24]Mark J. P. Wolf, Building Imaginary Worlds, The Theory and History of Subcreation, New York, Routledge, 2012, p. 38. Voir également a ce sujet : Anne Besson, Constellations, des mondes … Continue reading » remarque M. J. P. Wolf, et ceux des JdR n’échappent pas à la règle : ils oscillent en permanence entre richesse et incomplétude, et font varier ce curseur selon le degré d’intercréativité qu’ils souhaitent mettre en place.

Si nous avons défini ces trois typologies selon trois époques différentes, il va de soi que ces catégories cohabitent, et qu’il est courant de voir des jeux qui proposent des univers à intégrer, comme RuneQuest, de nos jours. En outre, il ne faut voir dans cette « évolution » aucun jugement de valeur, chacun offrant une mise à disposition différente des univers de fiction. En termes d’évolution cependant, il apparaît clair que le JdR « délègue » un nombre toujours plus élevé d’agents fictionnels en répartissant différemment les autorités générative et résolutive.

CD

Notes

Notes
1 Coralie David, Jeux de rôle sur table : l’intercréativité de la fiction littéraire, thèse de doctorat en Littérature générale et comparée, Paris, Université de Paris XIII, avril 2015.
2 Emily Care Boss, Breaking the Ice, Plainfield, Black and Green Games, 2005.
3 Ernest Gary Gygax, Dave Arneson, Dungeons & Dragons, Lake Geneva (WI), Tactical Studies Rules (TSR), 1974.
4 John Ronald Reuel Tolkien, The Lord of the Rings, London, George Allen and Unwin, 1954-1955.
5 Jack Vance, The Dying Earth, New York, Hillman Periodicals, 1950.
6 Le principe de Lumpley a été formulé par Vincent Baker et Emily Care Boss, deux auteurs de JdR. Cité par Joseph Young, « Théorie 101 – 1re partie : le système et l’espace imaginaire commun », Places to Go, People to Be (ptgptb), l’e-magazine de fond des rôlistes, en V.F., http:// ptgptb.fr/theorie-101-1ere-partie-le-systeme-et-l-espace-imaginaire-commun, traduction de Pierre Nuss, 2005 [consulté le 30 septembre 2015], http://ptgptb.fr/theorie-101-1erepartie-le-systeme-et-l-espace-imaginaire-commun [consulte le 31 décembre 2018].
7 Steve Perrin, Greg Stafford, RuneQuest, Oakland, Chaosium, 1978. Nous citerons la seconde édition du jeu de 1980, qui ne présente pas de différences majeures avec la première de 1978.
8 Graeme Davis, Tom Dowd, Andrew Greenberg, Mark Rein. Hagen, Lisa Stevens, Stephan Wieck, Stewart Wieck, Vampire: the Masquerade, Stone Mountain, White Wolf, 1991.
9 Le Grümph, Oltrée !, Jouy-le-Moutier, John Doe, 2013.
10 RuneQuest, op. cit., p. 4.
11 Perrin, Stafford, RuneQuest, op. cit., p. 7.
12 Ibid., p. 102.
13 Gygax, Arneson, Dungeons & Dragons, op. cit.
14 Perrin, Stafford, RuneQuest, op. cit., p. 22.
15 Nous nous référerons à la première édition de 1991 (Graeme Davis, Tom Dowd, Andrew Greenberg, Mark Rein. Hagen, Lisa Stevens, Stephan Wieck, Stewart Wieck, Vampire: the Masquerade, op. cit.).
16 Vampire: the Masquerade, op. cit., p. 51.
17 Ibid., p. 13-14.
18 Ibid., p. 132.
19 Ibid., p. 179.
20 « Bac à sable (VO. Sandbox) – un style de jeu ou les joueurs vagabondent dans le paysage, sans que le meneur de jeu ne leur indique la direction. Rob Conley, Bat in the Attic (about 2010) », Le Grümph, Oltrée !, op. cit., p. 33.
21 Ibid.
22 Le Grümph, Oltrée !, op. cit., p. 4.
23 Olivier Caïra, Définir la fiction, du roman au jeu d’échecs, Paris, Éditions EHESS, « En temps et en lieux », 2011, p. 98.
24 Mark J. P. Wolf, Building Imaginary Worlds, The Theory and History of Subcreation, New York, Routledge, 2012, p. 38. Voir également a ce sujet : Anne Besson, Constellations, des mondes fictionnels dans l’imaginaire contemporain, Paris, CNRS Éditions, 2015.
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